NE DISSOUT PAS UNE ASSOCIATION QUI VEUT!

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Le Conseil d’Etat, dans sa décision du 11 août 2023, a suspendu en référé la dissolution d’une association « les Soulèvements de la Terre », qui avait été prononcée par décret, estimant que le gouvernement n’avait pas apporté la preuve que cette association écologiste cautionnait des agissements violents envers des personnes.

Cette affaire intéressante à double titre pose d’une part, la question de la liberté associative, et d’autre part, renseigne sur le motif de dissolution. En effet, pour ce type de dissolution, il faut, justement qu’il y ait à la fois urgence et à la fois un doute sérieux sur la légalité de l’acte. Le juge est de plus en plus exigeant, au détriment de l’Etat, et ce même pour des associations extrêmes.

Sous l’angle de ce titre « Ne dissout pas une association qui veut ! » et au-delà de la décision du Conseil d’Etat, il existe des raisons pour lesquelles une dissolution peut intervenir dans une association à but non lucratif loi 1901.
Les motifs d’une association sont les suivants :
    Soit par décision de ses membres ;
    Soit par l’effet de clauses statutaires ;
    Soit en raison de lourdes difficultés financières ;
    Soit par décret en Conseil des ministres.

Dissolution de l’association par ses membres
Une association peut être dissoute à tout moment et cela, quelle qu'en soit la raison : activité sociale insuffisante, diminution du nombre des adhérents, pertes financières, difficultés de gestion, impossibilité d'atteindre les objectifs, etc. Il s'agit de la dissolution amiable ou volontaire.

La décision doit être prise dans le cadre d'une assemblée générale extraordinaire, à laquelle tous les membres doivent être convoqués, selon la procédure fixée par la loi et les statuts. Le président n’a pas le pouvoir de prononcer la dissolution de l’association de sa propre initiative (TGI Paris, 25 janvier 1980).
L'ensemble de la procédure peut nécessiter deux assemblées distinctes :
Lors de la première assemblée, les membres décident de la dissolution de l'association et désignent un ou plusieurs liquidateurs pour réaliser les opérations de liquidation.
Lors de la seconde assemblée (dite de clôture de liquidation), les liquidateurs présentent le compte de liquidation et obtiennent un quitus pour les actes de gestion auxquels ils ont procédé en tant que liquidateurs. Ce qui leur permet de se dégager de leur responsabilité.

•    Dissolution de l'association par l'effet de clauses statutaires
La dissolution de l'association peut intervenir en dehors de toute délibération de l'assemblée générale, par l'effet de certaines clauses statutaires.
Les statuts peuvent, en effet, prévoir la dissolution de l'association dans des hypothèses très diverses :
•    l’arrivée du terme prévu d'une association à durée déterminée (avec une date fixée à l'avance). Mais si les statuts ont prévu une possible prorogation du terme, l'association pourra revenir à la vie en cas de nouvelle déclaration en préfecture ;
•    la réalisation de l'objet statutaire, si l'association loi 1901 a été constituée pour un objet très déterminé (pour une opération ponctuelle, par exemple) ;
•    le nombre d’adhérents devenus inférieur à un minimum, 
•    les ressources insuffisantes, 
•    le décès ou la démission de tel ou tel dirigeant, 
•    le retrait d'un agrément, 
•    le refus de renouvellement d'une subvention, 
•    la disparition du bénévolat, etc.
Ce type de dissolution, du fait de son automaticité n'est pas sans risques. L'assemblée générale ne peut intervenir pour l'empêcher, la clause ayant déjà produit son effet lors de la réalisation de l'évènement.

Dissolution de l'association en raison de lourdes difficultés financières
Une association en difficulté qui n'est plus en mesure de payer ses factures, impôts ou cotisations sociales se trouve en cessation des paiements.

Une association en cessation des paiements doit déclarer sa situation au greffe du Tribunal de commerce ou du Tribunal judiciaire dans les 45 jours de sa constatation afin que celui-ci déclenche l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Elle ne peut pas faire l'objet d'une dissolution volontaire ou amiable.
Dans une telle situation, l'objectif des dirigeants doit être d'éviter que leur responsabilité personnelle  ne soit mise en jeu. Ils devront donc éviter de prolonger artificiellement la vie de l'association.
Dissolution de l'association par décret en Conseil des ministres
L’article L212-1 du Code de la sécurité intérieure prévoit les motifs suivants pouvant justifier d’une dissolution par décret en Conseil des ministres :
    la provocation ou incitation à la discrimination, à la haine ou à la violence ;
    la provocation d’actes de terrorisme ;
    la provocation à des manifestations armées dans la rue ;
    l’atteinte à l’intégrité du territoire national
    les violences physiques, incitation à la discrimination ou à la haine et atteinte aux biens commises par les membres d'une association de supporters, au cours de manifestations sportives.
La décision administrative de dissolution peut être contestée devant le Conseil d’Etat, par le biais d’un recours en annulation au fond ou en procédure d’urgence – notamment en référé-liberté au titre de l’atteinte à la liberté fondamentale d’association. A titre d’exemple, la dissolution de l’association les Soulèvements de la Terre retoquée par le Conseil d’Etat le 11 août 2023, suite à la décision prise par le gouvernement de dissoudre cette association. 
Il est également possible de demander un référé-suspension afin que le juge suspende temporairement la dissolution, mais il est nécessaire de déposer parallèlement un recours devant le Conseil d’Etat pour demander l’annulation définitive de la décision.
Dissolution de l'association par la justice
Le tribunal judiciaire peut décider de dissoudre une association lorsque :
    son objet social est illicite ;
    quand elle a commis un crime ou un délit ;
    quand des informations sont erronées, mensongères ou frauduleuses ont été déclarées et publiées au Journal Officiel ;
    en cas de paralysie irrémédiable du groupement due à l'obstruction systématique ou à l'inertie d'un ou de plusieurs membres ;
    s'il s'agit d'un mouvement sectaire.
En revanche, l'association n'encourt pas la dissolution lorsqu'elle a omis de faire connaître un changement de dirigeants ou la modification des statuts à la Préfecture, de façon incomplète, irrégulière ou a déposé la déclaration modificative hors délai.


Source : Association Mode d’emploi n°251 août/septembre 2023